ROCK EN SEINE (22, 23 et 24/08) – Domaine national de St Cloud

Avec Rock en Seine, grande fête de clôture saisonnière des festivals d‘été, on a souvent été ballotté dans tous les sens. En 12 ans d’existence, si le rendez-vous a su aligner des artistes indéniables, la programmation nous a souvent laissé un peu sur notre faim à force de jouer la carte de l’éclectisme et de l’ouverture, laissant parfois le rock de son nom un peu perdu au milieu des genres musicaux. Et pourtant, chaque année, on revient faire un tour au Parc de St-Cloud, trouvant toujours une satisfaction chez une poignée d’artistes.

Day 1
Arrivée en tout début de festival, on aimerait se jeter sur Cage the Elephant, mais l’occasion d’interviewer les membres de Traams, qui jouent un peu plus tard, nous en empêche. Tant pis, on arrive quand même à attraper la fin du concert et saisir la folie furieuse du groupe américain. Entre ballades pop et rock excité, le chanteur donne tout ce qu’il a, slamme dans la foule et chauffe les festivaliers a blanc. L’ouverture annonce la une journée réconciliée avec le rock.

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Après une petite balade sur le site, on s’assied tranquillement sur la pelouse de la Grande Scène pour écouter Gary Clark Jr. L’américain déroule un blues impeccable, soutenue par sa belle voix soul. Moment de détente bienvenue avant de se confronter au 1er choix crucial de programmation.
On décide de se séparer. D’un coté on va voir Wild Beasts qui nous avaient enchanté au Trabendo il y a quelques mois. Aucune raison pour que cela soit différent cette fois. A l’exception près que leur musique douce et pleine d’âme semble beaucoup moins convenir à l’atmosphère de festival en plein jour. Le son ne paraît pas optimal mais peu importe, avec la voix lyrique d’Hayden Thorpe et le génie que les 4 mettent dans leurs compositions, on reste conquis.
Pendant ce temps Traams fait le boulot de l’autre côté du festival. Les trois garçons vont à l’essentiel avec leur noisy rock mélodique, qui s’échappe tout de même un peu parfois sur une scène un peu trop grande pour le spectacle proposé.

Jake Bugg s’occupe de la suite sur la grande scène en rappelant l’héritage de la country/rock US. Du haut de ses 20 ans, le gamin à l’allure d’un jeune Gallagher est parfaitement à l’aise dans son registre mais reste un peu scolaire et manque un poil de relief. On s’ennuie un peu…
On va donc faire un tour devant Blondie, voir comment les 80’s ont vieilli. Si on est ravi de voir Debbie Harry dérouler les tubes, de « One Way or Another » à « Call me« , force est de constater que la vitrine n’a plus qu’un charme retro qui manque cruellement de souffle.
Les membres The Hives prennent la suite en complet noir et blanc comme à leur habitude, accompagnés de roadies ninja qui les suivent au moindre souci de micro. Avec toute l’arrogance qui les caractérise, le chanteur se lance en français entre chaque morceau pour faire crier la foule qui n’en demande pas moins à ce stade. Les musiciens s’en donnent à cœur joie dans un spectacle à la folie un poil programmée. N’empêche qu’on reste accroché par leur show sans répit et on loupe Mac DeMarco (oui, vous avez le droit de nous pourrir, mais on avait croisé sa route à St Malo le week end précèdent…) avant de filer fissa pour une des claques de ce festival.

Sur la petite scène Pression Live, le duo anglais Royal Blood fait ses armes alors que leur album vient a peine de sortir. A aucun moment on a l’impression d’être devant des débutants. S’ils manquent évidemment d’un peu de présence scénique (jamais évident pour un duo) et qu’ils ne révolutionnent pas le genre, ils déploient une telle puissance sonore qu’on en reste scotché. Entre stoner et métal, mais jamais foutraque, toujours maîtrisé, le combo basse/batterie fonctionne à plein régime et on s’en prend plein la figure… A peine fini, on se demande déjà quand aura lieu leur prochain concert !

Du coup, c’est un peu loupé pour Die Antwoord, dont on choppe juste la fin. Un peu dommage d’avoir raté par curiosité un show aux allures dingues et trash, mais on est pas sur qu’on aurait tenu jusqu’au bout de toutes façons.
C’est donc logiquement qu’on file vers Arctic Monkeys, devenus presque parrains du festival au fil des ans. Ceux qui avaient débutés comme les enfants du punk rock anglais énervés font maintenant figure de mastodonte. Ils ont pris du coffre, de l’assurance et croient dure comme fer à leurs titres. Le show est impeccable de maîtrise, tout le répertoire y passe, des tubes bondissant des débuts aux compositions plus amples d’aujourd’hui. On se dit que ces singes seront sans doute toujours la dans 20 ans, avec un répertoire immense et plusieurs morceaux devenus des classiques. De quoi clore une première journée plutôt emballante !

Day 2

Pour cette seconde journée à la programmation plus ouverte, on se donne rendez-vous en milieu d’aprem devant Junip. Le suédois José Gonzàles a retrouvé une belle inspiration avec ce projet mêlant ses mélodies folk à des nappes électro planantes. Et c’est parfaitement ce qu’il fallait pour se mettre dans l’ambiance, allongés dans l’herbe, sous un soleil qui redonne des couleurs d’été.
On enchaîne rapidement avec les français d’ALB, qu’on avais déjà croisé au Rock dans tous ses états, et qui sont visiblement ravi de jouer ici. Encore une fois leur pop entraînante emporte le morceau. La foule y prend du plaisir et se marre bien lorsque le duo délire sur une reprise du thème de MarioLand.
Retour sur la scène de la Cascade pour mettre les pieds dans le plat du rock garage avec Thee Oh Sees. Réduits à 3 sans leur chanteuse, recroquevillés au centre de la scène, protégés par des enceintes qui crachent, la bande de John Dwyer exulte son rock noisy. Leur réputation en live n’est plus à faire et d’ailleurs ils s’en foutent certainement, jouant surtout avec toute la fureur primale que le rock nécessite. Sans hésiter l’une des perle de cette journée !

Enchaînement presque logique avec Cheveu qu’on était ravi de revoir après La Route Du Rock. On a un peu de mal a être séduit au départ, notamment par le son foutraque pas très bien réglé. Mais les délires du chanteur et les bricolages punks électros du trio finissent par nous séduire ainsi que le public qui saute partout.
Une pause salutaire avec Emilie Simon de retour au festival accompagnée de l’orchestre national d’Île-de-France. Le chanteuse revisite son répertoire avec des instrumentations discrètes (ses musiciens sont aussi présents) et sa voix céleste est toujours aussi séduisante.

L’heure de Portishead approche et on se faufile dans la foule massive pour profiter au mieux du son. A défaut d’album, le retour sur scène de la bande de Goeff Barrow est une bénédiction tant ils se font rares (la joie de les avoir déjà vu le week end dernier). Le groupe sait ménager son set entre compositions d’une puissance sonore inouïe et morceaux plus calmes d’une beauté inégalable. Et chez eux, tous les titres sont déjà des classiques. De « Wandering Star » à « Glory Box« , en passant par « Cowboys » ou « Over« , on ne peut pas s’empêcher de trembler dès que résonne la voix de Beth Gibbons, toujours aussi ténébreuse et magnifique. Manquait peut-être juste un « All Mine« … Mais cela pourrait se terminer ici, c’était parfait. On ne les oubliera pas de si tôt !

Mais bon, comme le festival n’est pas fini, on remonte le site vers la scène Pression pour jeter un œil à Francois & the Atlas Mountains. Peu emballé par les albums jusqu’ici, on est quand même épaté de découvrir un groupe aussi a l’aise et énergique sur scène. Il faut admettre que la prestation est belle même sans être fan.
La fin de la soirée nous ramènera dans les 90’s, pas forcément les même que Portishead. On avait 16 ans, Prodigy posait sa pierre à l’édifice électro de cette période, et on sautait partout avec eux. Qu’en reste t’il ? Et bien une énorme machine son et lumière qui éclate les tympans à coups de beats acharnés. On ne peut pas renier que la rave donne toujours envie de bouger, et ça d’ailleurs, le public l’a bien intégré. Mais on en sort un peu lessivé, un peu fatigué par les cris hystériques des chanteurs qui gardent la pêche malgré l’âge et la violence constante du son. Peu importe, cette seconde journée est venue nous rappeler les souvenirs d’une époque autant que de nous donner quelques confirmations.

Day 3

Les jambes sont un peu lourde, la fatigue se fait sentir, mais tant pis, on tire sur les réserves car ça commence tôt pour ce dernier jour. En bonus, on a de la chance, le soleil tient bon.
En arrivant, on passe devant l’intro de Feu ! Chatterton, révélation française récente à suivre, pour foncer plutôt au bout du site pour Blood Red Shoes. Car on avait été assez séduits par l’énergie brute qui se dégageait de leur récent album. Et le duo anglais est venu confirmer tous le bien que l’on pensait d’eux. Si la grande scène n’est pas forcement adaptée pour le groupe, on retrouve avec beaucoup de plaisir leurs singles bondissants au son vintage. Steven Ansell tape très fort sur sa batterie et la frêle Laura Mary Carter pose sa voix lascive pour proposer un set bien punk et enervé.
Peu après c’est Cloud Nothings qui investi la Cascade. Le show n’est pas évident à appréhender. Peu communicatifs, les 3 garçons enchainent les titres lo-fi en jouant vite et fort, ce qui est plutôt bien… Et ca en fait sauter quelque uns au milieu de la foule. Mais il manque un truc pour nous faire décoller. Le son n’est pas génial, trop brouillon, peine à retrouver le grunge de l’album. On espère que leur prochaine venue dans la capitale sera meilleure dans une petite salle.

Entre la tournée de chanteuses et le défilé rock plus agressif, cette journée est un peu double. On assiste donc au show cinglé d’Airbourne. Armés d’un rack d’enceintes impressionnant, les australiens ne font pas dans la demie mesure… l’hommage à AC/DC n’est même pas caché. Les guitares envoient leur hard rock furieux et Joel O’Keeffe, le chanteur hurle et joue avec le public sur l’avancée de scène. On espère juste que tout va bien pour lui après s’être éclaté quelques canettes de bières sur le crane pour les lancer dans la foule. Un public dans lequel s’est formé à plusieurs reprises des circle pit ou les plus téméraires se sautent dessus. Même si tout cela n’a rien de neuf, il faut admettre qu’on s’est bien marré pendant une heure.
De l’autre coté, on calme nos ardeurs avec les 4 filles de Warpaint. Cela peut paraître un peu long et mou, mais il faut lire un peu entre les lignes pour apprécier la mélancolie qui se dégage de ce rock posé et noir. On y reviendra, c’est promis (Trianon annoncé).

En revanche, on a beaucoup plus de mal avec Brody Dalle, madame Josh Homme a la ville. Le son est beaucoup trop fort et fouilli. On apprécie son énergie punk et trash mais les oreilles fatiguées après quelques titres, on préfère regarder de loin Janelle Monàe et son show soul un peu calibré mais entraînant.

La foule s’est massée en force devant la grande scène, Les jeunes filles sont déjà en furie, prêtes à admirer la diva. Allez, on tente de voir ce que donne Lana Del Rey quand même… Que dire sinon que le spectacle ne fait illusion que quelques temps. Gonflé par des batteries et guitares trop présentes, les chansons se ressemblent et l’ennui se fait sentir. Et puis Lana minaude tout le concert, boit son smoothie à la paille entre chaque morceau. Sa voix est pourtant toujours la mais on lâche l’affaire à la moitié, un peu agacés par le surjeu de la belle.
Le temps de se rassasier, on grappille quelques morceaux de La Roux qui assure un concert électro pop et new wave assez sympa. Mais on part déjà se placer pour le clou du festival.
Il fait nuit et Queens of the Stone Age entre en scène. Les premiers riffs de « Millionaire » puis « No One Knows » démarrent et nous avec. Le public venu en masse agite beaucoup la tête. En mêlant ses tubes déjà classiques aux morceaux du dernier album, le concert aligne une setlist presque parfaite. évidemment, la maîtrise musicale est indéniable, puissante et ravageuse. Et depuis que QOTSA s’est ré-inventé avec … Like Clockwork, le groupe atteint les sommets du rock en mélangeant ses riffs lourds et saccadés à ses compos pleine de blues et de spleen. Que ce soit sur « Fairweather Friend » ou « Vampyre of Time…« , ballades belles à mourir, « Make it wit chu » et « Smooth Sailing » au swing fou ou les brutales « Little Sister » ou « A Song for the Dead« , on reste hypnotisés par la performance sans faute de la bande de Josh Homme. Finish impeccable pour cette dernière journée de festival. Il va falloir se reposer un peu à présent…

Pour sa douzième édition, Rock en Seine nous a enfin donné l’impression de retrouver un peu de son sens. Si la variété de programmation dont fait preuve le festival en déçoit certains mais en attire d’autres, il faut bien se dire que le rendez-vous est devenu un état des lieux des musiques actuelles à la ligne directrice large, avec ses révélations, ses revivals, ses confirmations et ses leaders. C’est ainsi qu’on quitte St-Cloud avec la sensation d’une livraison assez honnête. Et de se dire qu’on sera certainement dans le coin pour la 13ème édition.

Photos © STBC et Rock en Seine
Remerciements à l’agence EPHELIDE

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